Je trouve les mots dans l’adversité
Tout est si soudain maintenant tout vient si vite désormais
tous ces mots qui m’attendaient pour enfin venir à l’existence
viennent en foule sur mes lèvres et mes doigts encore balbutiants
ils sont à moi ils ont toujours été près de moi et impatients
l’espace se dilate en cette aurore à nulle autre pareille
le temps s’affole le temps accélère parce qu’il m’appartient
le temps veut aller plus loin que jamais en cette aurore
où la poésie se met en marche contre la machine destructrice
contre tous ces autres mots accusateurs qui vous montrent du doigt
et qui se dissolvent dans la louange à la nouvelle santé spirituelle
ils n’ont pas plus de sens que les affamés qui les profèrent
ces affamés si déçus de ne pas pouvoir vous absorber
ces affamés aux dents corrompues d’animaux ahuris
je vais ailleurs maintenant on ne peut plus me faire mal
on ne peut vaincre celui qui sourit devant la cruauté
on ne peut rien contre la joie de bâtir une autre volupté
on est impuissant face à l’orgueil de l’homme meurtri
mon crâne dans sa béatitude s’est vidé de l’angoisse
de revivre les mêmes instants et les mêmes hontes
il est devenu ce qu’il a toujours désiré habiter
il est hanté par le nouvel art de vivre que lui promet sa résurrection
il est le nouvel homme qui ne compatit plus avec lui-même
il est le nouvel esprit qui ne se regarde plus agoniser
il est enfin à la place que lui avait assignée son désir de vivre.