La fureur des dieux
et c’est dans ce rêve que je contemple ces monceaux de cadavres
ils semblent bien vouloir se mouvoir
ces cadavres surpris par le néant et qui tentent d’articuler quelque chose
comme si tout n’était plus que délire
certains voudraient tant revenir à la vie pour nous parler
mais je poursuis mon chemin comme si j’étais talonné par des miroirs
et je sais bien que les cadavres s’accumulent
les cadavres ne peuvent que pulluler tous ces coupables
à la grande joie des crapules de la divinité
mais dans le rêve les miroirs tendent à s’agrandir
parce que l’espace veut rompre avec ce qui le réduit
parce que l’espace désire être occupé de nouveau
l’espace a envie de crier qu’il est minuscule
cet espace bondé de dépouilles mortelles et sanguinolentes
des cadavres qui sentent la haine qu’on leur vouait
des cadavres qui puent le meurtre divin
un charnier des charniers des centaines de charniers qui ne peuvent neutraliser l’espérance des miroirs
car le ciel est un miroir qui me reflète qui nous reflète
parce que les dieux essoufflés sont à jeter à la corbeille comme un vieux papier froissé
c’est bien cela qu’on me souffle à l’oreille nous n’avons plus besoin d’eux
et je répète ces mots et je n’ai pas peur de me répéter
nous n’avons plus besoin d’eux même les miroirs parlent avec moi
on ne cesse de me chuchoter ma tête se balance comme si une petite musique hypnotique se levait enfin
et je continue de marcher il ne faut jamais cesser de progresser
et il faut regarder devant soi et il ne faut lever les yeux que si des miroirs flottent au-dessus de nos têtes
un firmament qui nous reflète enfin