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Les Vers Luisants
14 juillet 2016

Petites comédies sentimentales (3)

Je reconnais que je me montre un très bon confident mais que, également, mes conseils peuvent parfois mettre le doute sur mon esprit de sérieux et, même, j'ose le dire, sur ma santé mentale;  mes interlocuteurs les plus indulgents et inquiets me demandent, à ces moments-là, si je n'ai pas besoin de repos, ajoutant même que leur médecin pourrait m'être utile. Mais c'est surtout hier qu'une dame vénérable, une personne âgée, je veux dire, fut complètement décontenancée quand je lui dis qu'il fallait se dépêcher de manger avant son double, souvent très glouton, si l'on ne voulait pas prendre le risque de mourir de faim. Je m'explique. 

L'autre soir, alors que je m'apprétais à me mettre à table, très heureux à l'idée de goûter un plat que j'avais mis une heure et demi à cuisiner, alors que j'allais m'asseoir pour passer un bon moment culinaire, qui vis-je, installé à ma place et avalant goulûment mon canard aux olives? Mon double, qui, de plus, se gorgeait sans vergogne de mon Côte du Rhône. Et, comme je lui tapotais l'épaule pour lui signifier son incorrection, il me lança un regard indifférent et continua de se bâfrer et de boire. Au bout de dix minutes, il se leva, me salua et me prévint que le lendemain il réapparaîtrait sans faute. Mais le lendemain, au moment où il réapparut, je le bousculai contre le mur et pris place devant mes tagliatelles à la carbonara. Un peu plus tard, mon double, vaincu, qui s'était assis en face de moi et m'avait regardé manger avec tristesse, me dit qu'il ne voulait pas entrer en conflit avec moi, avec lui-même, que nous devions entretenir des relations harmonieuses. Il ajouta pour me rassurer que mes trois autres doubles, n'étant pas aussi rapides que moi, avaient fini par mourir d'inanition. Je lui rétorquai que j'étais complètement indifférent à la mort de ces énergumènes et le priai de se dissoudre à jamais. Se levant, il se courba légèrement devant moi, respectueux de son vainqueur.

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